C’est autour d’un ensemble de tableaux issus de la série Peintures de nuages que l’exposition s’articule: des grandes toiles où se déploient des nuages sur un paysage aux couleurs pastels. Jusque là, plutôt classique. À en faire pâlir les délicats paysages chinois ! Seulement, des bouts de phrases reviennent sans cesse: « light rains tonight (...) tomorrow cloudy followed by clearing, cooler than today » ou encore « CONGRESS VOTES WAR ». Il s’agit du titre de la couverture du New York World Telegram : « 1500 DEAD IN HAWAII CONGRESS VOTES WAR », précédé dé la météo annoncée plus haut. Les peintures à l’aspect onirique basculent dans une réalité brutale, celle de l'entrée en guerre des États-Unis d’Amérique lors de la seconde guerre mondiale. Ces inscriptions sont aussi bien violentes dans leur contenu que dans leur disposition sur les toiles. Mais la douceur des nuages est rappelée par la figure de Miss Rankin -- Jeanette Rankin étant la seule parlementaire à chercher une issue pacifiste de ce conflit. La naïve peinture au nuage devient peinture d’histoire ! Ce qui est intéressant ici, c’est le mélange de l’académisme de la peinture aux événements contemporains. Parce que “cloud” en anglais, c’est le nuage mais c’est aussi l'ensemble des big datas qui enregistre des informations sur nos vies personnelles. Aussi, le nuage a toute son importance la découverte de la perspective atmosphérique à la Renaissance. Cette hybridation se ressent également dans la technique utilisée: traditionnel fondu chromatique à la peinture à l’huile, pochoirs, bombes aérosols, coulures... C’est avec une émotion subtile que Benoît Maire crée un lien entre le fond et la forme, le concept et l’histoire où les énigmes demeurent. Chaque élément est ici à sa place, chaque œuvre contribue à une harmonie générale pleine de sens.